Il y a des moments dans une vie qui vous transportent, la découverte de l’univers de R. Schumann hier soir et de ses deux œuvres : Fantaisie op17 en ut majeur et Quintette pour piano en mi bémol majeur, opus
S’il est admis que notre être peut nouer une relation spirituelle avec une musique, celle-ci étant le reflet de l’âme de son auteur, l’expression de ses sentiments profonds, reconnaissez alors qu’il est aisé de tisser un lien particulier avec le génie créateur ! En tout cas, le temps du concert, et les heures qui ont suivi, l’esprit de R. Schumann ne m’a pas quittée…
C’est à l’occasion des Fêtes musicales de Touraine et grâce à la gentillesse de Valérie qu’il m’a été permis d’assister à ce merveilleux spectacle, salle des mariages de l’hôtel de ville de Tours.
Le pianiste Michel Dalberto fait son entrée, s’installe devant le magnifique piano à queue Steinway & sons et après que la salle se soit plongée dans un silence empoignant, il se mît à jouer avec virtuosité
Dès les premières notes, j'ai vu mon cœur et ma gorge se serrer, j’étais, pour ne rien vous cacher, dans des prédispositions propices à entendre et ressentir la déclaration de Schumann. C’est dans le désespoir qu’il composa cette œuvre, elle est la retranscription de la douleur qui le déchira lorsqu’il dut se séparer, contraint et forcé, de sa bienaimée Clara. Il lui écrivit d’ailleurs : « Pour que tu comprennes bien
Quelle beauté des harmonies… quelle puissance ! La musique parle parfois bien plus que les mots, évocatrice et percutante, elle m’a plongée dans d’envoûtants souvenirs et dans la nostalgie d’un bonheur pas si lointain, mais impossible en soi.
Je connus un bref instant de sursis lorsque les dernières notes laissèrent place à une ovation, qui l’espace de quelques minutes m’extirpa de cette mélancolie.
Mais c’était sans compter sur la suite, l’arrivée du Quatuor à cordes Modigliani pour accompagner Michel Dalberto dans le fabuleux Quintette m’immergea dans un spleen quasi Baudelairien, tiraillé par la magie que constituait cette formation.
Le deuxième mouvement, lent, In moda d’una marcia me fît je crois, quitter les lieux… projetée dans une pièce où j’étais seule à profiter de la musique et de son art à procurer pléthore de sensations formidables. Ma mémoire s’en donnait à cœur joie, m’offrant sur un plateau doré tant de tendres et intenses souvenirs portés par les élans lyriques et chaleureux des instruments, que les silences pesants, les dissonances chargées, et les impulsions tourmentées rendaient saturniens car aujourd’hui devenus chimériques.
C’était comme la première étreinte d’un être cher ou la dernière, celle qui fige le temps, qui vous bouleverse, que vous souhaiteriez voir durer éternellement car si sublime, si magique, mais pourtant vous la savez éphémère, le plaisir qu’elle provoque n’en est que plus fort, et son détachement que plus pénible…
Hier soir, ma « relation » avec R. Schumann était toute en émotion, je m’efforçais de croire que sa musique était mienne, j'en comprenais les peines, percevais les pensées, je la vivais, alors qu’elle touchait sans aucun doute toutes les âmes de l’auditoire.
Vous savez, ce sentiment de se sentir en parfaite osmose avec une chose terriblement désirée, la posséder comme lui appartenir, alors qu’en réalité elle ne peut-être que partagée, car déjà tant aimée…
Alexandra.